[Entretien] Journalisme local : “Son essence, c’est la polyvalence”

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Geoffroy Berthaud, rédacteur en chef de l’Echo d’Ancenis et Edouard Daniel, journaliste à Ouest France Angers proposent leur vision de la presse de proximité.

1. La presse locale est-elle confrontée aux mêmes problématiques que la presse nationale?

Geoffroy Berthaud : Oui. Depuis quelque temps, on assiste à une érosion des ventes, tant au niveau national que local. C’est moins flagrant au local car il y a moins de sites internet qui concurrencent le print, bien que cela soit en plein développement.

Edouard Daniel : Globalement, la presse souffre. Le Télégramme et Ouest France arrivent toutefois à se maintenir. Les groupes régionaux sont en difficulté. Par exemple, La Nouvelle République a fermé plusieurs éditions locales.
Avec la crise, le nombre de ventes a diminué et la qualité des journaux aussi. Les magazines hebdomadaires locaux sont très ruraux. Toutes les publications du groupe Publi-Hebdos ont la même maquette! Au local, beaucoup de journaux sont des tabloïds. Ils ont perdu leur identité.

2. La presse locale sur le web: bilan de parcours

G. B. : Malheureusement, je ne peux pas vous répondre car j’ai très peu de recul. L’Echo d’Ancenis fait partie du groupe de presse indépendant Edit Ouest, qui détient aussi Le Courrier de la Mayenne et Le Haut Anjou. Ces journaux ont une bonne déclinaison web, tandis que la nôtre est très jeune, puisqu’elle date de novembre 2012.
Ce que je peux dire, c’est qu’il est impensable de proposer gratuitement sur le web le même contenu que dans un journal papier. Les paywalls sont amenés à se développer, inévitablement.
A l’Echo d’Ancenis, nous sommes sur Facebook et sur Twitter. Facebook contribue grandement au trafic de notre site internet. Nous ne produisons pas de contenu web. Parfois, lorsque les contraintes du journal papier empêchent la publication d’un article, nous le diffusons uniquement sur le site internet.

E. D. : Il existe très clairement un problème de personnel. Il faut pas valoriser le web au détriment du papier et de la vidéo.
On disait que les tablettes et les smartphones allaient sauver la presse. Je pense que ce n’est pas le cas, car on s’est contenté de copier les contenus du print sur le web, sans originalité, sans plus-value.
C’est très flagrant dans la presse locale. Pourtant, aujourd’hui, le site internet est l’image de marque d’un média. Le public jeune se tourne tout d’abord vers le contenu numérique.

Ouest France, pour 766 970 exemplaires diffusés chaque jour, a 28 236 fans sur Facebook et 44 049 followers sur Twitter.
L’Echo d’Ancenis, pour 10 000 exemplaires diffusés chaque semaine, a 320 fans sur Facebook et 27 followers sur Twitter.

3. L’alerte, l’instantané existent-ils pour la presse locale?

G. B. : Je ne pense pas que cela ait grand intérêt, car il n’y a pas assez d’actualité dite très chaude.
L’avantage de la presse nationale, c’est justement de pouvoir proposer une information nationale et internationale. Le problème est géographique.

E. D. : Oui.

4. Que peut-on faire dans un journal local qu’il est impossible de faire dans un journal national?

Geoffroy Berthaud entouré de ses deux journalistes.
Geoffroy Berthaud entouré de ses deux journalistes.

G. B. : Il faut tout d’abord dire que la presse nationale ne peut pas couvrir l’actualité locale, que chacun joue dans sa cour.
L’essence de la presse de proximité, c’est d’être polyvalente. Nous autres, journalistes, sommes des observateurs de la vie locale.
Nous devons être très rigoureux dans notre travail car nous côtoyons tous les jours les mêmes personnes qui nous connaissent et qui vivent ce que nous rapportons dans le journal.
La presse locale, c’est l’école de la rigueur.

E. .D. : On est généraliste. Au national, on est journaliste d’un service. Au local, on peut aussi bien traiter dans la même semaine un sujet culturel, sportif ou un fait divers.
Les chroniqueurs et les correspondants sont rares. De plus, les moyens et les logiques ne sont pas les mêmes.
Le journalisme local est très formateur car il entretient ce rapport de proximité avec les gens.

5. Quelle est votre conception du journalisme?

G. B. : Mon objectif est d’être un observateur fidèle de la vie locale.
Il faut absolument faire abstraction de ses opinions personnelles et ne pas trahir la confiance des gens.

E. D. : Il faut être à l’écoute, être passionné, cultivé. Il faut être honnête et clair.
Il faut être humble.

 

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