Damien Allemand de Nice-Matin: “Les lecteurs participent à la construction du site“

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Le groupe Nice-Matin a mis en ligne la bêta de ses nouveaux sites nicematin.com et varmatin.com. L’objectif ? Inclure les internautes dans le processus d’amélioration en les faisant réagir sur un groupe Facebook. Damien Allemand, chef du service digital du groupe Nice-Matin, revient sur la démarche et la collaboration avec les internautes.
[Interview réalisée fin septembre]

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D’où vient l’idée de cette démarche ?

La bêta a été mise en ligne le 15 septembre car nous avions un délai à tenir. Nous savions que nous n’étions pas prêts pour une version définitive et c’est pourquoi nous avons choisi de publier cette nouvelle mouture en bêta. Ainsi, au lieu d’avoir des retours négatifs sur une version officielle, les internautes nous sont d’une grande aide en nous aidant à améliorer cette version incomplète avec leurs retours positifs et constructifs !

Dans l’esprit du crowdfunding qui a permis d’aider la reprise de Nice-Matin en société collaborative, un groupe Facebook a été créé pour recueillir leurs retours.

Justement, comment analysez-vous ces retours ?

En deux semaines [L’interview a été réalisée fin septembre] nous avons recueilli plus de 100 contributions que nous listons dans un tableau Excel pour les recouper et les classer.

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Heureusement, beaucoup de bugs déclarés étaient déjà connus, mais certains retours ont été très précieux, à l’instar des lecteurs utilisant Edge sous Windows 10 que nous n’avons pas à la rédaction.

Nous avons récemment informé sur le groupe Facebook des modifications qui seront apportées en priorité, à la suite d’un vote des internautes.

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Les développeurs sont très contents d’une telle démarche, similaire à celles que l’on peut trouver dans la production de solutions open source mais encore peu commune dans les médias.

Que pensent les autres services de cette initiative ?

Les pôles marketing et pub nous ont fait des retours très positifs ! Nous n’en avons pas eu des autres journalistes de la rédaction, mais nous savons qu’ils ne sont pas contre.

Nice-Matin a déjà fait appel à la générosité des lecteurs pour aider sa reprise en coopérative. Aviez-vous alors en tête de les associer au redesign du site ?

Non, pas vraiment. La campagne de financement participatif a globalement eu lieu par intérêt. Nice-Matin avait reçu des offres de reprises avec des plans sociaux très durs et une offre des salariés qui a finalement été retenue. En parallèle du crowdfunding, nous avions organisé des concerts de soutien et des manifestions. C’est par la suite que nous avons engagé une réflexion sur la place du lecteur de Nice-Matin.

Vous avez donc mis en place une nouvelle stratégie ?

Tout à fait. La stratégie digitale du groupe a été élaborée en collaboration avec Benoît Raphaël. La version bêta est la deuxième pierre de cette stratégie. La première était la reconstruction du service digital de Nice-Matin. Au changement de propriétaire, il ne restait plus que trois journalistes (dont moi) et un développeur. Nous avons eu recours à la mobilité interne pour créer un service digital qui regroupe 25 personnes aujourd’hui.

Comment a été pensée la bêta ?

Nous avons réalisés entre 45-50 ateliers sur deux mois environ. Il y avait des journalistes, des « marketeux », des commerciaux, etc. Tous les corps de métiers du journal étaient présents. Nous avons commencé par imaginer ce qu’on voulait sur le site (au niveau de la stratégie éditoriale). Un UX designer était présent au cours de ces ateliers qui étaient animés par Benoit Raphaël.

Dans ces ateliers a émergé l’idée d’un site basé sur l’information en temps réel, d’où le graphisme de notre bêta, conçu comme un fil live.

Nous allons mener des tests utilisateurs avec les internautes du groupe Facebook et les journalistes de Nice-Matin un peu plus tard dans l’optique d’améliorer le parcours utilisateur. Des tests A/B seront également réalisés pour décider du design graphique du nouveau site.

La bêta est mobile first car cela fait un certain temps que Nice-Matin reçoit plus de visites du mobile que du desktop. Pour cela, nous avons fait un gros travail d’analyse de statistiques.

Nous avons également pris en compte la forte proportion d’accès direct au site : 60 % des internautes accèdent directement à nicematin.com pour s’informer. Facebook représente, à titre comparatif, 25 % du trafic entrant.

Qu’apportera la nouvelle version du site ?

Le futur site ira plus loin dans l’offre abonnés en invitant ces derniers à des débats et des rencontres. Aussi, les commentaires seront exclusivement réservés aux abonnés dans l’univers payant et il n’y aura plus de commentaires sur le site temps réel (gratuit). On renverra sur la page FB pour ceux qui désirent commenter.

Nous nous sommes inspirés de sites qui marchent tels que airbnb pour notre carte.  

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Le Monde l’a fait avant nous : sa Matinale a notamment emprunté à Tinder. À l’inverse, les sites d’information existants ne nous ont pas donné énormément d’idées, à part peut-être France TV Info pour le flux continu.

Nous avons véritablement réfléchi à une nouvelle manière de nous adresser aux lecteurs. Je trouve Mashable remarquable sur ce point. Il faut sortir du ton de la dépêche AFP et impliquer le lecteur.

Cela passe-t-il par une personnalisation de l’information ?

Exactement ! C’est un gros pilier de l’offre abonnés. Le nouveau site permettra de filtrer les informations pour permettre aux internautes d’accéder en priorité à ce qu’ils aiment. Nous allons également leur demander ce qu’ils veulent lire avec une page à la Netflix.
À Nice-Matin, nous pensons que grâce à la personnalisation du journal que nous arriverons à vendre du contenu.